-On toque à la porte monsieur. Vint avertir Armand.

-J'ai cru entendre. S'étonna Michael. Qui cela peut-il bien être? Je ne vois personne depuis des décennies et Maddison est à l'heure actuelle chez elle...

-Peut-être un promeneur surpris par l'orage cherchant un endroit pour s'abriter... Voulez-vous que j'aille ouvrir? Proposa Armand en se dirigeant vers l'entrée.

-Non! S'exclama Michael presque paniqué à cette idée. Il ne faut pas que l'on sache que ce manoir est habité! D'ailleurs je vais lui rendre son apparence de vieux taudis, comme ça si jamais cet étrange visiteur entre...

-Voulez-vous que j'aille voir qui est-ce? Je peux revêtir mon apparence d'entité invisible et aller voir pour vous.

-Non, attends... L'en empêcha Michael en le retenant par l'épaule. Écoute plutôt... J'entends une voix...

-Vraiment? Interrogea Armand avant de prêter l'oreille. Oh... Effectivement...

Les deux hommes n'avaient pas tord. En effet quelqu'un parlait derrière l'imposante porte en bois, appelait plus précisément le maître des lieux. Une petite voix enfantine paniquée et en pleurs, s'époumonant d'un air désespéré tout en tapant des poings sur la porte. Une petite voix que le jeune homme reconnaîtrait entre mille...

-Mais... C'est... Souffla-t-il, inquiet par ce qu'il attendait. Non ça ne peut pas être...

-Monsieur! Attendez! Tenta de l'arrêter Armand en le voyant se précipiter soudainement vers la porte.

Mais son maître ne l'écouta pas, pris d'une grande inquiétude. Il se dépêcha d'ouvrir la porte, priant que ce n'était pas ce qu'il pensait. D'habitude cette voix le rendait instantanément heureux mais là elle l'inquiétait plus qu'autre chose. Ce n'était pas normal qu'il l'entende, pas le soir et encore moins sanglotant. Quelque chose n'allait pas et il craignait le pire en ouvrant la porte...

La petite fille était debout, ou plutôt tenait à peine debout devant lui. Elle tremblait de froid et de peur, trempée jusqu'aux os, sanglotant. Ses vêtements étaient abîmés, complètements mouillés et couverts de boues et même déchirés à certains endroits. Pire encore le corps de la fillette était aussi dans un sale état: en plus des traces de boue, elle présentait aussi des égratignures plus ou moins profondes aux mains et un de ses genoux était méchamment écorché et saignait, sans compter le regard paniqué et rempli de détresse qu'elle avait. Elle était méconnaissable, faible et sans défense...

-Mi... Michael... Sanglota-t-elle en voyant enfin apparaître son ami.

-Maddison! S'écria ce dernier, paniqué à la vue de la petite fille. Oh mon dieu mais qu'est-ce qu'il s'est passé?

Il se laissa tomber sur ses genoux afin de se retrouver à hauteur de l'enfant, ignorant la douleur de la chute. La fillette en larme se jeta dans ses bras et redoubla de sanglots, ce qui ne fit qu'accroître l'angoisse du jeune homme qui la serra fort dans ses bras comme pour la protéger. Il se hâta de se lever, la portant, la réchauffant comme il pouvait. Il était mort d'inquiétude en la voyant dans un tel état, cette vue lui était insupportable.

-Oh mon dieu Maddie... Souffla-t-il, la voix tremblante. Armand, j'ai besoin d'aide! Vite!

-Seigneur! S'exclama ce dernier, lui aussi inquiet à la vue de la petite fille. Amenez la au salon monsieur!

-Vite! Le supllia-t-il. Une couverture, même plusieurs si il le faut! Et de quoi la soigner, elle est blessée! Oh mon dieu ma petite Maddie...

-Michael... Continua-t-elle de pleurer, serrant le chemiser de son ami dans ses poings, tremblant comme une feuille. Michael...

-Je suis là Maddie, c'est fini... Tenta-t-il de la rassurer tout en caressant sa tête mouillée. Je suis là, ça va aller maintenant...

Il lui répétait ça tout en se dépêchant d'aller dans le petit salon. Il poussa d'une main un des petits fauteuils près de la cheminée et y allongea la pauvre enfant afin de la réchauffer près des flammes de cette dernière. Armand ne tarda pas à revenir avec le matériel demandé. Michael le remercia et l'envoya préparer un chocolat chaud ou toute autre boisson chaude pour réchauffer Maddison tandis qu'il s'occupait d'elle. Il lui passa la couverture autour de ses épaulés avant d'examiner son genoux atrophié, voyant ce qu'il pouvait faire pour la soigner.

-Mon dieu mais qu'est-ce qu'il s'est passé? Lui demanda-t-il toujours aussi inquiet. Qui t'as fait tout ça? Et qu'est-ce que tu fais dehors, sous l'orage à une heure pareille?

-Maman... Papa... Toute cette horrible ville... Répondit-elle en sanglotant. Je les déteste! Oh Michael aide moi je t'en supplie...

-Quoi? Demanda-t-il, ne comprenant rien à la situation. Calmes toi Maddie, calmes toi et explique moi ce qu'il s'est passé...

La fillette tenta de se calmer comme elle pouvait tandis que le jeune homme désinfecta et banda sa jambe blessée puis ses mains. Elle lui raconta péniblement tout ce qu'il s'était passé durant la journée: comment les habitant l'avaient terrorisé au parc et condamné le portail menant au manoir, comment son institutrice avait visiblement mal interprété ses paroles et s'était mêlé de ses affaires avec ses parents alors qu'elle l'en avait défendu, comment cela avait provoqué la colère de ces derniers et comment ils l'avaient cruellement grondé et puni suite à cela... Comment ils lui avaient hurlé dessus et même frappé, jeté les objets auxquels elle tenait, déchiré son doudou puis comment ils s'étaient de nouveau disputés puis partis chacun de leur côté, la laissant seule chez elle... Comment elle avait pris la décision de fuir cette ville qu'elle ne supportait plus, qu'elle s'était enfuie sous l'orage malgré la peur de ce dernier, qu'elle avait parcouru les rues sombres et désertes sous cette pluie battante afin d'aller le retrouver... Comment au parc elle avait pris son courage à deux mains et escaladé le grillage quitte à s'écorcher les mains dessus, comment en passant de l'autre cotés de ce dernier elle avait malheureusement chuté et s'était ouverte le genoux, comment malgré la peur et la douleur elle avait couru jusqu'au manoir afin de le retrouver... Et enfin elle le retrouvait, enfin...

Le jeune homme était hors de lui après avoir entendu tout cela. Il était rempli de tristesse pour son amie mais surtout de colère et de haine envers ses parents et la ville de Normal Valley en générale. Il était tellement en colère contre eux qu'il se surpris à jurer à voix haute devant la petite fille qui, heureusement pour lui, était trop épuisée et mal au point pour prêter attention à ce qu'il disait. Comment pouvait-on fair des choses pareilles à une petite fille de huit ans qui ne demande qu'à être elle-même et à s'épanouir comme les autres enfants? Comment pouvait-on être aussi dur avec elle alors que ce n'était qu'une simple enfant? Comment pouvait-on lui faire ça? Vouloir la faire grandir trop vite? Abandonner ses rêves et ses goûts? La terroriser pour sois disant la faire rentrer dans le droit chemins? Comment des gens se disant être ses parents ou étant parents d'enfants de son âge pouvaient-ils faire ça à une enfant comme les autres? Car oui elle était comme tout les autres enfants de son âge! Qu'est-ce qui la différenciait autant? Et surtout, cela était-il une raison pour la traiter ainsi? Il n'arrivait tout simplement pas à y croire tant cela lui était insoutenable à entendre... Cette ville n'apprenait donc jamais...

-Michael? Demanda faiblement la petite fille, s'emmitouflant comme elle pouvait dans la couverture.

-Oui Maddie? Lui répondit-il d'une voix calme et douce tout en l'aidant à se couvrir. Je suis là, ne t'inquiètes pas.

-Je... Commença-t-elle avec hésitation. Laisse moi rester ici... S'il-te-plait Michael...

Il ne su pas quoi lui répondre. Évidement il n'avait qu'une envie: lui dire oui. Mais il devait réfléchir. En effet il ne pouvait pas la garder comme cela. Elle avait tout simplement fugué, ce qui signifiait qu'on allait la rechercher. La police allait même surement partir à sa recherche, sans compter l'inquiétude de ses parents qui, malgré leur ignoble comportement, tenait à leur enfant. Il ne pouvait pas la garder indéfiniment, c'était tout bonnement illégale malheureusement...

-Maddie, je ne sais pas... Lui répondit-il à contre-coeur. C'est risqué tu sais et... Et puis les gens vont être inquiets et te rechercher en voyant que tu as disparu...

-Mais je ne veux pas qu'ils me retrouvent justement! Répliqua-t-elle les larmes aux yeux. Je ne veux plus retourner là-bas Michael... Si j'y retourne... Si j'y retourne, ils vont encore être méchants avec moi voir pire... Ne me laisse pas avec eux je t'en supplie Michael! Ils vont tout faire pour qu'on ne se voit plus en plus... S'il-te-plait... Je ne veux plus vivre là-bas, ils ne savent qu'être méchants et je ne veux plus vivre avec des gens aussi méchants...

Elle le regarda d'un air suppliant, laissant couler une larme sur sa joue. Le coeur de Michael se serra face à cet appel à l'aide désespéré que lui lançait son ami. Il devait faire quelque chose pour elle mais il ne pouvait pas, c'était bien trop risqué... Il en avait déjà subit les terribles conséquences il y a des années, il ne pouvait pas se permette de reprendre de tels risques... Mais c'était tellement terrible pour lui de voir son amie souffrir autant, cela le brisait surement plus que si il faisait quelque chose et en payait les conséquences après. Jamais on ne lui avait demandé autant son aide, jamais on ne lui faisait autant confiance au point de lui confier sa vie en quelque sorte, ce n'était pas rien.
Il cogita dans sa tête un moment, ne sachant pas quoi faire. C'était faisable sa requête, il devait juste faire attention à ne pas se faire prendre... Et puis au pire, grâce à ses pouvoirs il pouvait faire pas mal de choses... Mais était-ce vraiment bien d'arracher comme cela une enfant à sa famille? Même si à ses yeux ses parents avaient été odieux avec elle au point de se demander si ils méritaient vraiment d'avoir un enfant, ils aimaient malgré tout leur fille et sa disparition les détruirait. Quoi de pire pour un parent que de perdre son enfant, de le voir disparaitre? Mais n'était-ce pas un forme de punition finalement pour leur attitude détestable envers leur fille qui n'avait même plus vraiment d'amour envers eux visiblement? Non, il ne devait pas penser ça, c'était cruel... Mais il ne voulait pas lui non plus la laisser retourner là-bas, dans cette ville où il savait qu'elle était Ét sera toujours malheureuse, encore plus suite à tout ce qu'il s'est passé durant la journée... La laisser retourner là-bas, c'était presque la sacrifier, la condamner à une vie triste et maussade, et ça il ne le voulait pas... Mais qui diable écouter? La raison ou le coeur? Fallait-il être raisonnable et respecter la loi ou alors fallait-il écouter son coeur et protéger son amie, quitte à transgresser loi et morale?

-S'il-te-plait Michael... Répéta de nouveau la fillette au bord des larmes.

-Je...

Son regard... Son regard si innocent remplis de détresse... Ce visage d'habitude si joyeux aujourd'hui complètement ravagé par la peur et la tristesse...

Plus jamais il ne voulait voir ce visage autrement que souriant...

-C'est d'accord. Annoca-t-il enfin calmement. Je te protégerai et te cacherai ici.

-Ce... C'est vrai? S'exclama la petite fille sous le choc.

-Oui. Lui répondit-il avec un sourire tendre. Tu n'as plus rien à craindre maintenant Maddie, ici tu seras en sécurité.

Il n'eut même pas le temps de finir que l'enfant se jeta dans ses bras en larmes, pleurant de joie cette fois-ci. Surpris mais touché, le jeune homme la serra doucement contre elle, caressant son dos pour la réchauffer. Son corps était gelé et trempé... Il pria qu'elle ne tomba pas malade à cause de cela. La fillette ne cessa de le remercier de tout son coeur, sanglotant tant l'émotion était forte, soulagée d'avoir enfin trouvé un abri. En plus d'avoir trouvé un lieu où elle allait enfin être tranquille, elle avait surtout pu retrouver son ami et cette fois-ci elle ne le quitterait plus.

-Tu sera en sécurité ici. Lui murmura doucement Michael tout en la serrant dans ses bras. À partir de maintenant ne laisserai plus personne te faire du mal...

Michael avait ensuite appelé ses serviteurs. Il avait confié à Carmen, une des domestiques, le rôle de gouvernante. Il lui demanda d'installer la fillette dans un des chambres, si possible la plus grande et la plus belle qu'elle pouvait trouver, ainsi que de lui donner un bain chaud afin de la réchauffer et de la laver. Lui se chargerait pendant ce temps des préparatifs du dîner et de raccommoder ses vêtements grâce à ses pouvoirs. La jeune femme avait obéit et pris soin comme demandé de l'enfant, et avec qui d'ailleurs elle s'entendit bien rapidement. Il faut dire qu'elle avait longtemps était gouvernante de son vivant, elle savait donc s'y prendre avec les enfants et Maddison la trouvait gentille et drôle. La fillette se sentait revivre maintenant, soulagée et heureuse à l'idée de rester ici avec Michael et sa famille. Elle se sentait comme libérée..

Elle l'était maintenant.

-Monsieur? Vint demander Armand à son maître qui était debout devant la cheminée, l'air pensif. Puis-je vous parler?

-Oui, qu'il y a-t-il? Demanda Michael intrigué.

-Et bien c'est à propos de notre hôte... Répondit-il d'un air hésitant. N'est-ce pas un peu...

-Un peu risqué? L'interrompit-il. Bien sure que si, malheureusement...

-Je sais bien que vous voulez protéger et aider cette pauvre petite mais... Mais vous ne pouvez pas vous permettre de risquer une nouvelle fois votre vie... Rappelez-vous ce qu'il s'est passé il y a plus de vingt ans de cela...

-Bien sûr que je m'en rappel Armand... Soupira le jeune homme. Mais cette fois-ci j'ai l'impression que si je ne fais rien, ce serait encore pire que si je me faisais prendre à faire ce que je fais actuellement... Oui, je ne me le pardonnerai jamais si je la laissais retourner dans cette fichue ville... Au diable ma sécurité et ma vie! La sienne est bien plus importante...

-Comment? Qu'est que vous dites? Demanda-t-il surpris.

-Et je suis plus que sérieux Armand... Continua Michael. Au pire, qu'est-ce que cela peut faire si il devait m'arriver quelque chose? Au pire je finirai comme vous, je ne comprends même pas pourquoi vous vous inquiétez à ce point...

-Vous n'avez pas tord, c'est juste que nous tenons à vous qui avait encore le privilège d'être vivant.

-C'est gentil, je te remercie. Dit-il avec un petit sourire. Je veux juste rendre cette petite heureuse... Et puis... Non rien, c'est idiot...

-De quoi? Vous pouvez vous confier sur ce qui vous tracasse monsieur.

-Rien, juste... Une pensée farfelue...

-Quoi donc? Il n'y a pas de pensée idiote. Tenta de la rassure Armand.

-C'est que... C'est que je suis heureux à l'idée que Maddison restera ici maintenant. Elle mérite tellement le bonheur cette petite... Je sais qu'ici elle est heureuse, enfin je crois... Et je me suis rendu compte que... Ça semble fou voir stupide ce que je vais dire mais... Mais j'ai le sentiment que maintenant nous allons enfin avoir ce que chacun de nous deux désirent depuis si longtemps...

-Et quels sont ces choses tant désirées sans indiscrétion?

-Et bien... Avoua-t-il hésitant. Maddison ne demande que de l'amour et de l'attention, être une petite fille comme les autres et pouvoir s'amuser librement et être aimée et moi... Moi je...

Il hésita de nouveau. Son idée lui semblait trop farfelue... Et pourtant...

-Moi... Continua-t-il timidement. Moi j'ai toujours désiré devenir père...